mardi 29 mars 2011

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A force de venir prendre mon kir à neuf heures, j’ai fini par croiser ses yeux noisette et , au sommet de mon audace, de lui offir une coupe. Elle se mit à rire et s’est moquée de moi, du genre: t’en as mis du temps! J’ai forcé le trait, je l’ai soudoyée: un autre?, en me marrant comme une barrique et, profitant de son rire rauque, l’invîtant à une soirée hip-hop chez de parfaits inconnus bourrés de thunes. A ma grande surprise, elle accepta. Même sous la pluie, ajouta-t-elle. Car il pleuvait, en effet.
Et il plut toute la journée, moi comme un lion en cage, même les crocs émoussés, je n’en pouvais plus d’attendre le soir. Vers dix-huit heures, j’attaquais au Sauvignon chez Fanfan, me demandant si Marie allait venir rire avec moi...

vendredi 18 mars 2011

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Marie, je l’ai trouvée dans un bistrot du XVème devant une coupe. Elle riait comme personne, vraiment comme personne. Il était neuf heures du matin et elle finissait sa nuit. Marie travaille dans un bar et s’achève en pleine forme à deux heures du matin, fin prète pour remettre ça - alors elle s’en envoie deux ou trois pour attendre que Jojo ouvre Les Sports à six heures.
Marie est faîte d’une beauté sauvage. Si elle dansait, je dirais qu’elle réincarne Isadora Duncan, et si elle écrivait, Simone de Beauvoir. Marie est unique, impossible, riante sans arrèt, toujours une vanne au coin des lèvres. Bref, je suis instantanement tombé amoureux de son blouson élimé de cuir noir, de ses cheveux en bataille et de ses yeux pétillants.
Mais pas elle. Elle m’a souri une fois, puis ignoré.

Ainsi alla ma vie, au début.

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Tu me manques!
Un petit gamin frappé d’un éclair de joie folle fait jaillir des éclaboussures de pigeons à Saint Sulpice, à toi mon amour! Je crie, je pleure, tu me manques, sept semaines, sept roses blanches, envoyées à cette seule adresse laissée sur ton premier texto. Je t’aime , qu’y puis-je, je t’emmène au pays des fleurs, en espérant. Il est tôt sur cette place du Vème, nous y venions poser des cierges que tu allumais avec ta cigarette, mécréante! Ma mécréante bien aimée!
Ensuite un thé au bistrot du coin, deux croissants, pas un mot, des sourires, l’amour fou. De quoi se renverser les cœurs transis de cet hiver au jour clair.
Je pleure de toi, larmes lentes mais abondantes. A toi mon amour! A ta santé, à ta jeunesse en devenir, à nos ruts endiablés dans des hotels de Belgique! Improbables hotels d’Anvers, d’Oostende, où nous attendaient les flots givrés, les vagues arrêtées, j’exagère à peine! C’est ainsi que vont les jours clairs. De surprise en baraques à frites au vinaigre. Les pistolets aux goûts variés, les bières et les dames blanches. Les longues ballades sur le sable froid vers les étendues sans fin. L’horizon blanc, mer et ciel dans le blanc mêlés, ventrus.

jeudi 17 mars 2011

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Tu verras, je finirai bien par t’envoyer les sept roses blanches pour ton anniversaire. Je ne connais pas ton adresse, mais enfin, il y a des annuaires. Même si loin.
Pourquoi sept? Parce que je compte les semaines depuis toi. Trop. Tout ce temps égaré. Les pas perdus et les chariots vides. Ce train vers cet obscur pays, sans moi. Le jour où je t’ai perdue, je me suis juré de te récupérer. D’une manière ou d’une autre.

mardi 15 mars 2011

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L’amour fou, s’en défaire pour mieux y revenir, plus fort. S’en défaire c’est la douleur elle-même, séparation, bris de verres, saigne mon poignet, saignent mon nez, mes yeux, tout ce qui fait de moi un être humain et perdu. Alors on envoie des fleurs, sur fond de Sauvignon de Touraine, une rose blanche par semaine disparue, évanouie, comme le visage aimé.
Puis c’est le cœur qui se met à répandre son sang noirâtre, et là, il faut que je te retrouve, coûte que coûte! Où que tu sois, nous n’avons pas vécu ce mois et demi pour en arriver là?? C’était la Fiesta Del Sol tous les jours et Cannes toutes les nuits. Nous ne pouvons pas nous déchirer comme un vieux pull, nous avons d’autres putains de chats à fouetter!

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La clarté matinale du jour a toujours été un mystère pour moi, même si, de manière générale, je me lève tôt pour en goûter les premières heures.
J’aime surtout l’hiver et ses lents frissons, lueurs de l’aube soleil rasant, voici l’enchantement, sans rien n’y comprendre vraiment. Juste cela, l’enchantement du matin.
Ce sont des heures maigres, translucides, on sent qu’elles annoncent quelque chose de bon, voir de beau.
Longtemps j’ai cru que ce jour clair serait celui de mon suicide.
Mon dernier jour.
Après un long voyage à travers la blancheur de la nuit, vingt minutes de sommeil, me retrouver en face de moi-même, ou du moins ce que je crois être mon visage dans le miroir de la salle de bain, seule et unique glace de la maison, fatigué mais sublime, clarté du dernier jour, aussi clair que le premier, celui d’avant, m’abandonner à mon penchant naturel pour la mort volontaire.

Mais voilà qu’aujourd’hui, tout a changé.














Prologue





L’amour fou, s’en défaire pour mieux y revenir, plus fort.
S’en défaire c’est la douleur elle-même, séparation, bris de verres, saigne mon poignet, saignent mon nez, mes yeux, tout ce qui fait de moi un être humain éperdu.
Alors on envoie des fleurs, sur fond de Sauvignon , une rose blanche par semaine disparue, évanouie, comme le visage aimé.
Puis c’est le cœur qui se met à répandre son sang noirâtre, et là, il faut que je te retrouve, coûte que coûte! Où que tu sois.
Nous n’avons pas vécu ce mois et demi pour en arriver là?? C’était la Fiesta Del Sol tous les jours et Cannes toutes les nuits. Nous ne pouvons pas nous déchirer comme un vieux pull, d’autres chats vont venir
pour détricotter les laines épaisses.
Et revenir à Oostende pour quelque batonnets glacés en plein hiver, sur la plage de sable noir.








Aux éventuels lecteurs de passage...





Ce blog est un "récit en train de se faire". Je n'en connais ni le début, et surtout ni la fin.
D'ailleurs, ai-je envie de la connaître cette fin?